Johnny Howard – Mathieu Siro : la fin

20/05/2013

Johnny Howard et Mathieu Siro ont arrêté leur carrière à l’issue de cette saison 2012-2013. Après plus de 10 ans de carrière pour chacun, les deux demi de mêlées racontent leur carrière. Portrait croisé.

L’un a 32 ans, l’autre 33. L’un est anglais, l’autre français. Pourtant, ils ont évolué sous les couleurs rouge et bleu deux saisons durant. Du moins ensemble et en concurrence. Mais aujourd’hui, il est tant pour eux de tirer leur révérence. « Oui j’arrête. Ça me fait mal au cœur mais oui. » débute Johnny Howard. « Oui en tant que joueur professionnel c’est ma dernière saison que j’ai commencé voilà 12 ans » commente Mathieu Siro… un mois plus tôt. Car c’est bien connu, les anglais ne font rien comme les autres. Plus de quatre semaine après l’ancien carcassonnais, rendez-vous est pris avec le nouveau restaurateur, dans ses locaux.

Howard – Siro – Bisman : La passation de pouvoir
« Excuses moi mais entre la fin de saison, l’ouverture du restaurant et tout, je n’ai pas eu le temps de répondre. ». Finalement, c’est plus agréable sur la terrasse à la mi-temps de Castres-Montpellier. A l’annonce de sa retraite sportive, Johnny Howard assure ne pas avoir pris sa décision sur un coup de tête « J’ai pas envie de dire que c’était un bon moment parce que c’est jamais un bon moment quand tu arrêtes ta carrière. Ça fait 17 ans que je fais ma passion. C’est une bonne période là pour ma famille, pour moi. Je n’ai pas décidé comme ça. La décision, on l’avait pensée depuis décembre. ». Pourtant, avec seulement 28 matchs en deux saisons, il aurait pu raccrocher pour cette raison. Mais il n’est pas plus contrarié que cela. « Déçu oui et non parce que j’avais une blessure compliquée en début de saison. Mais bien sur je suis dans un club pour jouer mais en même temps, j’étais fier des joueurs qui jouaient à ma place. J’étais très content pour Thibaud à la fin de la saison et j’espère vraiment qu’il fera une bonne saison l’année prochaine. » Comme une passation de pouvoir.

Mathieu Siro a plus été surpris de ne pas jouer, même s’il trouve une possible explication « Déçu… un peu oui pour une dernière saison j’aurais aimé plus participer.Je ne sais pas si c’est le fait que je partais fréquemment en formation mais c’est une situation nouvelle pour moi sachant que dans tous les clubs où je suis passé j’ai toujours joué fréquemment. » Une formation d’entraîneur, suivie à Marcoussis, qu’il met à profit du centre de formation de l’ASBH d’où sort le jeune Thibaut Bisman. Et comme un symbole, le jeune demi de mêlée a remplacé Howard à Albi et Siro à Carcassonne. D’ailleurs, c’est l’anglais qui vente ses qualités « Première chose, il est complètement barjot (sic). Deuxième chose, c’est un mec avec un gros cœur, qui a envie, qui bosse fort. On a beaucoup de jeunes qui ont besoin de prendre exemple sur lui et de travailler comme lui parce que c’est peut-être pas le meilleur talent, mais c’est un mec qui bosse. Si tu as 15 bosseurs, normalement, tu es très très dangereux comme équipe. »
Le Palois d’origine, malgré son peu de matchs, a bien failli terminer sa carrière contre son ancien club, Carcassonne. Un match qui lui tenait particulièrement à cœur « Il y avait un mélange de nostalgie car c’était la dernière fois que j’allais jouer sur cette pelouse en tant que joueur. De la découverte aussi avec ces nouveaux vestiaires dans la nouvelle tribune et beaucoup de motivation due à l’enjeu du match pour le maintien du club et personnel car ça faisait longtemps que je n’avais pas joué. »

 

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Siro au chômage, Howard amoureux de la France.

Car avec l’USC, le désormais ex demi de mêlée Biterrois a participé à la fabuleuse remontée du club audois. Parties de Fédérale 2, les troupes de Christian Labit se sont hissées en quatre ans aux portes des demi-finales de ProD2. Alors que la saison d’avant, Mathieu Siro jouait à Lyon… « A cette période il faut reconnaître que j’étais insouciant et que je n’avais pas connu d’échecs sportifs. L’objectif du club cette saison était la montée que nous n’avions pas obtenue donc j’avais une clause libératoire que j’avais levée car je devais signer dans mon club formateur qu’est la Section Paloise sauf que pour des raisons obscures qui dépassent le cadre du sportif ça ne s’est pas fait. Donc je me suis retrouvé au chômage car cette histoire a duré longtemps et le marché était déjà bouclé à mon poste. C’est la que Christian Labit m’a contacté et que d’un intermède qui ne devais durer que quelques mois en attendant autre chose s’est transformé en une aventure de 4 ans avec 2 montées. ». Tomber pour mieux se relever. Et vivre une expérience hors du commun « Oui, ce fut une aventure folle pleine de souvenir et un rêve fou car cela avait été annoncé dès le début de l’aventure. » poursuit-il. Depuis son départ de Bayonne en 2006, le natif de Pau n’a pas regoûté aux joies du Top14. Ce qui laisse une pointe de regrets « Oui c’est sur que on y a goûté c’est difficile de s’en passer mais je suis réaliste, le TOP 14 a pris une telle ampleur ces dernières années que je suis plus invité. Cependant le PROD2 est devenu un championnat passionnant dans lequel je m’épanouis pleinement. ». Malgré ce, c’est bien dans le monde amateur qu’il garde de très bons souvenirs. Signe du destin ou pas, il a également acquis la montée contre Tyrosse, un an avant l’ASBH « Il y en a beaucoup j’ai eu la chance d’avoir de multiples titres de champion de France tant chez les jeunes qu’en seniors plus des sélections nationales. Mais plus que des souvenirs sur le terrain j’ai plus le souvenir de moments forts hors terrain dans les vestiaires, les retours de bus, les soirées d’après match ; c’est plus ça qui me reste de toutes ces années. Mais je dois dire que la victoire à Tyrosse en demi finale retour, signifiant la montée du club en PROD2, a une saveur particulière car c’était l’aboutissement d’un rêve commencé 4 ans plus tôt. ». Une fin de carrière, certes, mais pas une coupure avec le monde du rugby. Il a déjà travaillé sur sa reconversion « Oui cette formation [celle qu’il fait à Marcoussis, NDLR] correspond au titre d’entraîneur professionnel donc je vois mon avenir dans ce milieu là mais plus en tout cas pour l’instant vers la formation. ». L’année prochaine, il sera entraîneur-joueur du Sporting club Leucate Roquefort.

Alors que l’un a goûté au rugueux rugby de la Fédérale 2, l’autre jouait la Hcup. Et avec Northampton. Un double rêve « Mon premier club, c’est Northampton. C’était forcément mon rêve de jouer dans un grand club et j’avais le plaisir de jouer la Hcup, jouer plusieurs finales à Twickenham. Après, j’ai noté que quand je jouais en Hcup, on avait joué contre Biarritz plusieurs fois. Mon meilleur moment en Hcup c’était de jouer contre Toulouse dans le stade de foot (Le Stadium, NDLR), j’étais titulaire. On avait pris une branlée (sic) (Défaite 37-9, NDLR) mais c’était d’être là, en face de Michalak, Ellisalde et tous les meilleurs joueurs du moment.». A partir de ce jour là, le 1er Avril 2005 , il n’a plus voulu rentrer en Angleterre «  Après, j’avais dit que ça devait être énorme de jouer dans le sud de la France et Bayonne m’a appelé. Jouer dans le Top14, c’était énorme. Et puis je suis tombé amoureux de la France. ». Un pays qu’il ne quittera plus. Partir de Northampton était devenu son objectif, question de qualité de vie « Comme j’ai dit, on avait joué trois fois contre Biarritz dans une saison : les matchs de groupe et le ¼ de finale à Anoeta à San Sébastien. Chaque matin après le match on faisait la récupération dans l’Atlantique, le soleil,… L’ambiance est vraiment différente de Northampton, qui est au milieu de l’Angleterre et c’est nul, le temps est pourri (sic), on mange pas bien. Moi, mon rêve était de jouer dans le sud de la France dans une grande équipe et Bayonne a contacté mon agent. » Même s’il n’a joué que huit et cinq petits matchs sur la saison, il garde un très bon souvenir de son passage sur la côte basque « Mon premier et mon meilleur souvenir c’est mon premier match à la maison. On était sorti des vestiaires avec la Pena Baiona et là, c’est une ambiance unique, c’est magique, c’est une ambiance de fou…une ambiance gladiateur. Tu perds pas, c’est interdit. Tu perds jamais, c’est énorme. ». dit-il, les yeux brillants de bons souvenirs. Mais tout ça ne va pas durer. Pas conservé, Johnny Howard est en quête d’un nouveau challenge. Mais à tout prix en France, peu importe le niveau ou l’équipe ! Et c’est Aix qui raflera la mise « Newcastle m’avait contacté mais j’avais pas envie de repartir dans le nord de l’Angleterre. J’avais envie de chercher une bonne équipe en France. Ça partait pas très bien mais j’étais dans le sud de la France, j’ai rencontré ma femme ici donc c’était mieux qu’on reste dans le sud de la France. Même en ProD2. Quand tu regardes la différence entre la Premiership et la ProD2, il y a une grande différence, c’est juste la vitesse mais il y a plus de physique en ProD2. Ça a fait un choc au début mais après, c’est un challenge quoi. ». Un passage lui permettant de se relancer grâce à ses 27 matchs… qui taperont dans l’oeil de Jean Anturville.

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Johnny Howard et ses exploits.

Jouant pourtant 27 matchs sur 30 durant sa saison en Provence, il ne poursuivra donc pas l’aventure, séduit par le projet Biterrois « Après Aix-en-Provence, j’avais plusieurs opportunités encore de rentrer en Angleterre mais Béziers me proposait une aventure avec un certain Andrew Merthens aussi et nous deux, on avait signé pour la Fédérale 1 et on descendait d’un niveau encore mais le projet, le club, le fait que la région ait vraiment une histoire de rugby m’intéressait énormément. Comme Northampton, le club est vraiment le cœur de la ville. Ça m’a intéressé et voilà. ». Aujourd’hui, si l’ASBH est en ProD2, elle le doit bien à son demi de mêlée même si c’est la victoire du groupe. Deux inspirations géniales au ras du ruck à quelques secondes du gong final contre Bourg-en-Bresse, puis à Tyrosse qui ont permis au club Biterrois de retrouver l’antichambre du plus au niveau. Mais il reste modeste. «C’est de la chance. C’est que ça. Voilà. C’était important pour le club, pour moi parce que ça me donnait un an de plus. On était tous dans la merde (sic) si on gagnait pas le match. C’est le groupe qui a gagné, c’était pas deux essais. »Deux essais permettant à tout un peuple de lui redonner de la fierté…et de célébrer à nouveau après une dernière victoire contre Périgueux, un titre de champion de France ! Des moments que l’anglais n’oubliera pas « J’ai les photos dans mon bar. C’est obligé parce que ça reste cette émotion,la pression avant tous les matchs, les supporteurs qui nous suivent partout mais c’est génial. C’est un souvenir qui restera en moi toute ma vie. C’était énorme avec un bon résultat à la fin. On était champion de France quoi. ». Champions dans une division difficile, compliquée. Tant au niveau du jeu qu’au niveau des joueurs eux mêmes, souvent dans l’esprit du rugby de clocher. Il se souvient «Ça change complètement de la Hcup mais là on voit les vrais fourchettes (sic), on voit un assortiment de tactiques un peu différentes mais bon, c’est une expérience positive. ». Toutefois, ses bonnes performances au troisième échelon français ne lui ont pas permis de s’imposer véritablement en ProD2 avec 28 matchs en deux saisons. Des difficultés à l’image de l’équipe. « Oui c’était dur ces deux ans, sauf depuis décembre dernier. On avait mérité d’être mieux et je pense que tout le groupe a toujours bien bossé, on a donné du cœur, de l’envie. C’est pas arrivé de suite, mais on est en ProD2 et c’est l’objectif. J’espère vraiment que le club y restera plus tard parce qu’il le mérite. ».
Avec Northampton et Bayonne, Johnny Howard a connu des publics en folie. Pourtant, il ne tarie pas d’éloge sur le public Biterrois « Comme Thibaud (Bisman, NDLR), première chose, vous êtes barjots (sic). Mais je vous aime énormément et ça c’est l’esprit de Béziers. Même si je suis nul et tout le monde me chie dessus (sic), j’adore parce que vous avez le droit parce que vous êtes là si on est nul, vous êtes là si on est bien et ça c’est génial. Le club a besoin des supporteurs comme ça et j’espère que vous changerez pas. Ca aide énormément. Même si les supporteurs m’aiment pas, ça m’a aidé parce que ça me motive énormément et j’ai envie de changer, de bien jouer pour vous. Vous êtes magiques. ». Avant de conclure sur une touche de nostalgie, presque ému le Johnny quand il raconte ! « Tu oublies pas la première année où on est montée en ProD2, au Théatre devant tous nos supporteurs. On a défoncé un bus en plus après la finale, chanter devant tout le monde… La première année, la montée, franchement c’était génial mais le stade de la Méditerranée aussi c’est magique. On est bien dans ce stade, c’est énorme ! »

Pourtant, après Béziers – Aurillac, il ne reviendra pas fouler cette pelouse. Une page se tourne, une autre commence.

Maxime GIL